Infertilité : L’AMP aux confins du progrès médical

Je vous invite à lire cet article très intéressant et plutôt BAMP parlant des avancées de ces dernières années en matière d’AMP. Vous pouvez retrouver le version en ligne ici.
P.S. Le le Dr Joëlle Belaisch-Allart, pourrait donc devenir un potentiel contact ?

Infertilité : L’AMP aux confins du progrès médical

Qu’il s’agisse de la contraception, du tabac ou de la mastectomie préventive, de profondes remises en cause ont émaillé l’actualité ces derniers mois. L’Assistance Médicale à la Procréation ne fait pas exception. Du moins, pour les questions sociétales qu’elle soulève. Faut-il autoriser son accès aux couples de femmes homosexuelles ? Faudra-t-il permettre la gestation pour autrui ? Pour l’heure, le Dr Joëlle Belaisch-Allart, spécialiste de la question, dresse un bilan médical positif.

Le Généraliste. Quelles évolutions notables ont été enregistrées dans le domaine de l’Aide médicale à la procréation (AMP) ces dernières années ?
Dr Joëlle Belaisch-Allart. Louise Brown, premier bébé FIV dans le monde est née en 1978. En France, Amandine naît à Clamart en février 1982 puis Alexia à l’hôpital de Sèvres en juin de la même année. La FIV est au final une technique récente. Pour autant, la FIV d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec celle d’il y a 30 ans. Les femmes étaient hospitalisées 8 jours?; elles passent désormais quelques heures dans le centre le jour de la ponction, puis tout se déroule en ambulatoire.
Le progrès majeur des dernières années est la micro-injection de spermatozoïdes – ou ICSI – qui permet aux hommes souffrant d’infertilité majeure d’avoir une chance de devenir génétiquement père. La vitrification ou congélation rapide des ovocytes et embryons représente un autre progrès remarquable que ce soit pour l’ovocyte dans le cadre du don d’ovocyte (permettant la création de banques d’ovocytes) ou pour le blastocyste permettant la culture prolongée de l’embryon et le transfert d’un embryon unique de 5 ou 6 jours avec un taux de succès de 50 %. Aujourd’hui, 2,5 % des enfants qui naissent (soit un sur quarante) sont issus d’une technique d’Assistance Médicale à la Procréation (AMP). Ce taux peut sembler considérable mais, contrairement à d’autres pays où l’insémination n’est pas considérée comme une technique d’AMP, en France les inséminations intra-utérines (IIU) entrent dans le cadre de l’AMP tout comme la FIV, la micro-
injection, la congélation d’embryons congelés, le don d’ovocytes et l’accueil d’embryons.
Quelles sont les techniques d’AMP auxquelles on a le plus souvent recours ? Cette répartition a-t-elle évolué ces dernières années ? Si oui, pourquoi ?
Désormais l’ICSI est la technique la plus utilisée, 65 % des cas selon dans les dernières données de l’Agence de biomédecine. Les causes masculines d’infertilité liées à la dégradation de la qualité du sperme ou à l’âge des demandeurs, sont devenues la première cause de recours à l’AMP.
Les demandes d’AMP sont-elles satisfaites ?
L’AMP est prise en charge par l’Assurance Maladie jusqu’au premier jour du 43e anniversaire et la majorité des centres français ne prennent pas en charge les femmes au-delà de cet âge. Il faut rappeler que le taux moyen d’accouchement par tentative tous âges confondus est de 20 % en France (soit une tentative sur cinq). Mais ce taux chute à 5 % à l’âge de 42 ans ! Par comparaison, la fécondabilité, à savoir la probabilité de concevoir par cycle, est de 25 % à l’âge de 25 ans, 12 % à 35 ans et 6 % à 40 ans. Les délais d’attente sont de l’ordre de quelques mois avant la première consultation, le délai légal de réflexion de 1 mois avant la seconde consultation et la réalisation de la première tentative. Ces délais varient selon l’offre de soins. Il est évident qu’en région parisienne, les femmes attendent moins que dans les zones peu pourvues en centres d’AMP !
Quel est le taux d’échec de l’AMP ?
Il varie selon l’âge de la femme. Les taux cumulatifs des naissances (après 4 tentatives) dépassent les 70 % pour les femmes de moins de 30 ans mais n’atteignent pas 20 % après 40 ans. L’âge de la femme est un facteur décisif d’échec. Pour cette raison, l’OMS a modifié en 2009 la définition de l’infertilité afin de raccourcir l’âge de recours à l’AMP : un an de rapports réguliers infertiles suffit à motiver une consultation en centre spécialisé. Et toutes les sociétés savantes françaises recommandent de consulter au bout de 6 mois à partir de l’âge de 35 ans.
Connaît-on mieux les risques des techniques d’AMP pour la femme ?
Il reste quelques incertitudes mais les données sont en grande majorité rassurantes. Depuis la grossesse obtenue après inducteurs de l’ovulation par Bruno Lunenfeld en 1961 en Israël, plus de 45 ans se sont écoulés. Une épidémie de cancers aurait largement eu le temps d’apparaître et d’être rapportée… Dans une société ou le nombre de femmes infertiles augmente ainsi que l’âge de la première grossesse, les éventuels effets néfastes des traitements de la fertilité doivent être mis en balance avec les bénéfices physiques et psychologiques attendus d’une éventuelle grossesse grâce à ces traitements. Le risque zéro n’existe pas et si risque minime il y a, il est à mettre en balance avec le bénéfice d’avoir un enfant.
Quelles décisions politiques manquent à l’AMP ?
Il faudrait que nos tutelles soutiennent clairement la prise en charge de l’infertilité en France et que les politiques soient bien conscients que l’infertilité est une maladie au sens défini par l’OMS, à savoir un état de bien-être physique, psychique et social. L’AMP n’est pas une médecine de luxe ou de la convenance. Il est certain que par les temps de crise actuelle, ce discours est difficile à entendre mais nos patientes ne comprendraient pas que les IVG soient prises en charge à 100 % et que l’infertilité ne le soit pas.
Comment la France se place-t-elle du point de vue éthique par rapport à ses homologues internationaux ?
La France est très en retrait en matière d’AMP sociétale par rapport à l’Europe. D’après la loi de bioéthique, l’AMP est actuellement réservée aux couples formés d’un homme et d’une femme présentant une infertilité médicalement constatée. Les femmes seules et les femmes homosexuelles qui souhaitent un enfant sont acceptées dans les centres de nombreux pays européens limitrophes (Belgique, Espagne, Pays-Bas, Danemark, Grande-Bretagne). Certes, nous ne disposons pas de chiffres mais une visite dans un centre d’AMP de Bruxelles est édifiante. Le nombre de femmes françaises homosexuelles prises en charge en Belgique est impressionnant. Comment ne pas s’interroger sur le bien-fondé d’une loi qui interdit ce que l’état voisin autorise et parfois même au sein de la même communauté ? Le fait qu’une technique soit disponible ailleurs n’est en rien une justification mais il est indispensable de réfléchir avant de condamner une pratique ou de la qualifier de non éthique.
Il faut analyser les véritables raisons de nos attitudes, trop souvent basées sur des croyances davantage que sur la raison. L’intérêt de l’enfant, trop souvent mis en avant, n’est pas toujours évident. Les publications sur le devenir des enfants nés de parents homosexuels sont en majorité rassurantes. Les données de la littérature suggèrent, en effet, que la qualité de la parentalité intervient plus que l’orientation sexuelle des parents et que les enfants de mères lesbiennes ou de pères gays ne deviennent pas plus homosexuels que les autres et diffèrent peu des enfants élevés par les hétérosexuels en termes de développement psychologique et d’identité sexuelle. Concernant la gestation pour autrui, les hommes et les femmes sont certes égaux en droit mais différents physiologiquement. Et les femmes sont dépourvus de cet Y qui a assuré le pouvoir des mâles pendant de siècles. Faut-il, au nom de l’ « égalité » homme-femme interdire l’accès à l’AMP aux couples de femmes parce que la parentalité des couples d’hommes requiert des techniques plus lourdes et plus contestables ? Mais tout ceci n’est qu’un avis personnel.
Les récentes avancées des techniques de congélation des ovocytes permettent aux femmes de recourir à l’AMP à un âge où leur fertilité sera compromise. Faut-il autoriser l’autoconservation ovocytaire ?
Le désir d’enfant est de plus en plus tardif et les techniques classiques d’AMP ne compensent pas la chute de la fertilité liée à l’âge. Ce que seul le don d’ovocyte peut compenser. Les progrès de la congélation ovocytaire, l’autorisation de la vitrification ovocytaire lors de la révision des lois de bioéthique en 2011 et la possibilité offerte aux donneuses sans enfants de conserver une partie de leurs ovocytes pour elles-mêmes ont ouvert la voie à l’autoconservation ovocytaire dite de convenance. Cette pratique sociétale est légale dans certains pays et offre des avantages évidents pour les femmes. Toutefois ses conséquences possibles méritent un débat de société.
Propos recueillis par le Dr Linda Sitruk

Commentaires à propos de cet article (4) :

  1. Plutôt BAMP, oui ! Indépendamment des chiffres qui glacent le sang sur les taux de succès après 40 ans, le passage sur les décisions politiques me parait à mettre en gras et à applaudir ! Non ? Il faudra mais plus tard lister en effet des médecins et personnes à contacter pour les informer de la création du BAMP. mais structurons nous et finissons les manifestes, logos etc avant ! et il faut savoir qui peut faire quoi dans tout ça ! Apo
    Quelles décisions politiques manquent à l’AMP ?
    Il faudrait que nos tutelles soutiennent clairement la prise en charge de l’infertilité en France et que les politiques soient bien conscients que l’infertilité est une maladie au sens défini par l’OMS, à savoir un état de bien-être physique, psychique et social. L’AMP n’est pas une médecine de luxe ou de la convenance. Il est certain que par les temps de crise actuelle, ce discours est difficile à entendre mais nos patientes ne comprendraient pas que les IVG soient prises en charge à 100 % et que l’infertilité ne le soit pas.

  2. Article très intéressant au demeurant, il semble bien clair qu’il va falloir avoir des contacts avec des médecins, des politiques, etc mais je pense comme apo/6cellules qu’il va falloir bien structurer le collectif, ses objectifs….pour avoir une légitimité et une crédibilité a leurs yeux . Pour ça je pense qu’il est important de travailler les différents articles et travaux de recherche et cibler les personnes a contacter ensuite. Je vois mon médecin sur Amiens le 2 juillet et je pense lui parler de bamp!!!! Et voir avec elle ce qu’elle en pense et si elle est au fait de ce qui serait bon de développer et de qui interroger,..

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