Endocel – Coculture embryon-endomètre

Un peu d’histoire et d’organisation administrative de l’assistance médicale à la procréation en France.  Depuis 2004, la loi de bioéthique a donné à l’agence de la biomédecine « des missions  de régulation, d’encadrement, d’inspection, de promotion et d’évaluation » de l’assistance médicale à la procréation. C’est elle qui délivre les autorisation et les agréments pour la réalisation de nouvelles techniques.
Connaissez-vous l’Endocel ou  Coculture embryon-endomètre, avec les cellules de la mère ?
Petite histoire d’une technique innovante, qui a été « essayé » par certaines équipes, puis non autorisée par l’abm, au moment où elle allait être développée à plus grande échelle. Nous allons donc tenter de répondre à cette question : Pourquoi avoir stoppé l’autorisation administrative pour la pratique de cette technique de maturation in  vitro utilisant les cellules de l’endomètre de la mère ?
Dans les années 90, le support de culture des embryons étaient issus des cellules épithéliales de reins de singes (Cellules VERO), comme pour la fabrication de nombreux vaccins. En parallèles des milieux de cultures synthétiques  étaient aussi utilisés pour la culture des embryons avant leur implantation dans l’utérus maternelle. Puis les cellules de reins de singes n’ont plus été autorisé pour des raisons de sécurité sanitaire. Restaient donc les seuls milieux synthétiques validés eux, en tant que dispositifs médicaux en application de la réglementation européenne.
Arrive alors Endocel, proposé par le laboratoire Genévrier (France), recevant une autorisation de mise sur le marché en 2007, autorisation renouvelée en 2013 :

« ce milieu a obtenu le renouvellement de son autorisation de mise sur le marché en tant que produit thérapeutique annexe le 20 septembre 2013 par l’Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé ».

L’Endocel qu’est-ce que c’est et comment ça marche ?

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Source site Endocel

« Endocell® est le premier produit développé par « Genévrier Biotechnologie » ayant obtenu une autorisation de mise sur le marché de l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé en  2010.
Premier produit industriel personnalisé dans le domaine de l’Assistance Médicale à la Procréation, Endocell® est le seul système de coculture autologue embryon-endomètre.
Il se présente sous la forme de puits de culture contenant un tapis de cellules d’endomètre maternel sur lequel sont déposés après fécondation in vitro les embryons pour favoriser leur développement avant leur implantation. »

ENDOCELL® est un tapis de culture de cellules provenant de l’endomètre de la femme.

Chaque Endocell® est spécifiquement produit pour une seule femme. En effet, les cellules de l’endomètre utilisées ont été préalablement prélevées dans l’utérus de la femme par le gynécologue.
Le tapis de cellules est réalisé grâce un procédé de haute technologie dans le centre de biotechnologie des Laboratoires Genévrier.
Ensuite au cours d’un cycle de Fécondation In Vitro, l’embryon du couple sera déposé sur Endocell®, et sera donc en contact avec les cellules maternelles qu’il retrouvera une fois transféré dans l’utérus de la femme.
Endocell® va permettre à l’embryon de se développer jusqu’à un stade « avancé » appelé stade blastocyste (retrouvé 5 jours après la fécondation appelé aussi stade J5). Endocell® permet une culture prolongée des embryons. Ce type de développement qui consiste à déposer l’embryon sur des cellules d’endomètre est appelé coculture.

 

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Source Site Endocel

L’implantation de l’embryon humain dans l’endomètre maternel, étape-clé du processus reproductif, est un phénomène unique.
Son succès nécessite un endomètre réceptif, un embryon normal au stade blastocyste et surtout un dialogue entre les tissus embryonnaires et maternels. Au moment de l’implantation il y a une cascade d’événements,  extrêmement complexes, où l’endomètre et l’embryon entrent en contact.
La compréhension de ce processus implantatoire est loin d’être totale. Car 10 à 15% seulement des embryons replacés après AMP donnent naissance à un enfant.  Une partie des échecs incombe à l’embryon lui-même mais sont également dues à des anomalies de la réceptivité utérine.
Aujourd’hui, on peut évaluer qualitativement la capacité d’implantation des gamètes et des embryons, sans pour autant maitriser tous les critères de qualité embryonnaire.
En réalité, l’embryon ne peut s’implanter qu’au cours d’une courte période du cycle appelée fenêtre implantatoire. Cette période n’est pas clairement définie chez la femme mais on peut l’estimer à environ 5 jours à partir de l’ovulation (ou à partir de la ponction ovarienne, dans le cas d’une FIV/ICSI).
Le succès de l’implantation embryonnaire n’est pas seulement une question de préparation hormonale adéquate de l’endomètre ; c’est aussi le dialogue, synchrone et  réciproque entre l’endomètre et le blastocyste, dont nous ne connaissons pas les termes exacts. Facteurs de croissance et protéines sont des médiateurs privilégiés  de ce dialogue mais pourraient aussi entraver la fertilité par un profil d’expression ou de sécrétion anormaux.
Il est donc possible d’espérer de nouvelles avancées grâce à l’évolution des démarches diagnostiques et thérapeutiques personnalisées, comme la coculture cellulaire de l’endomètre  maternel.
La coculture est la mise en culture, dans le laboratoire du centre de FIV, des embryons obtenus après une FIV/ICSI et mis en contact des cellules de l’endomètre maternel. L’embryon dans de telles conditions peut puiser tous les facteurs nutritionnels nécessaires à sa survie et à sa capacité implantatoire, fournis par les cellules de l’endomètre maternel, avant même d’être transféré dans l’utérus. »
 
L’abm va aussi dans ce sens : « Considérant que l’embryon humain a un potentiel de développement limité qu’une des phases critiques du développement, correspondant à la phase d’activation du génome embryonnaire, est le passage de 4 à 8 cellules, soit après deux ou trois jours de culture (J2-J3),  que la capacité pour un embryon d’atteindre le stade de blastocyste traduit une bonne aptitude au développement et donc des chances d’implantation plus élevées que pour l’embryon à J2, qu’environ 50 % des embryons, conçus naturellement ou in vitro n’atteindront pas le stade de blastocyste après 5 à 6 jours de développement et que la culture prolongée permet ainsi de poursuivre la culture embryonnaire de trois jours en moyenne, d’identifier au sein d’une cohorte embryonnaire les embryons capables de se développer in vitro jusqu’au stade de blastocyste et de les sélectionner pour le transfert in utero ou la congélation embryonnaire ».
 
Comment expliquer que cette innovation permettant d’améliorer les résultats des FIV, ne soit plus autorisé après l’avoir été quelque temps ?

L’abm a fait marche arrière, alors qu’un laboratoire (privé Genevrier) avait tout mis en place pour développer cette pratique à grande échelle, après l’avoir testé dans deux services d’AMP au CHU de Strasbourg et à la clinique Jean-Villar), que certaines équipes d’AMP étaient elles aussi prêtes à le mettre en œuvre pour leur patientes en FIV.
L’abm apporte d’abord des éléments en faveur de cette technique  « de permettre un développement «physiologique» de l’embryon, avec des échanges possibles avec ce tissu (régulation du développement

embryonnaire par des cytokines ou des facteurs de croissance secrétés par les cellules endométriales, détoxification de ce milieu de culture, possibilité a priori supérieure à celle des milieux de cultures synthétiques« 
Plusieurs réponses sont apportées dans la décision de l’agence de biomédecine du 26 novembre 2013 « portant autorisation (qui est refusée au final) d’une technique visant à améliorer l’efficacité, le reproductibilité et la sécurité des procédés biologiques d’assistance médicale à la procréation (art.L.2141-1 du code de la santé publique) ».

Dans cette décision, il est pourtant écrit que cette technique d’AMP peut améliorer le processus de FIV en remplaçant les milieux synthétiques par un tapis de cellules endométriales de la mère, offrant ainsi de meilleurs conditions de développement, car plus proche de l’état physiologique naturelle. De plus cette technique est décrite comme apportant une certaine garantie de sécurité sanitaire par rapport aux milieux synthétiques.
Mais, mais, mais l’abm considère que le laboratoire et les deux études issues des deux centres d’AMP l’ayant pratiqué, n’apportent pas assez de preuve de son efficacité. Car malgré des taux de réussite d’implantation à 53.4 % pour des blastocystes sur milieu Endocel. L’abm critique les termes de l’étude qui comparait des implantations à J5 et à J3. Elle demande donc une nouvelle étude .
De plus, elle considère que le prélèvement sur le cycle précédent des cellules endométriales de la patiente, comportent des risques. Elle préfère donc maintenir le système de culture sur milieux synthétiques.
L’abm parle aussi de tarifs qui ne seraient pas forcément meilleur marché pour les équipes des centres publics.
Voilà pourquoi la technique Endocel qui avait bénéficié de la construction d’un laboratoire tout neuf, entièrement dédié à cette activité, n’a pas pu voir le jour. Les équipes d’AMP qui espéraient pouvoir améliorer les résultats des FIV pour les couples, ont rangé eux aussi, ce projet à « plus tard ».
Vous avez peut-être bénéficié, dans les années 2010 d’une FIV avec un milieu de culture Endocel ? Qu’en avez-vous pensez ?
Nous pouvons peut-être espérer qu’une nouvelle demande d’autorisation administrative pour l’utilisation de la technique Endocel soit déposée, étayé par une étude plus recevable pour l’abm. En tant qu’association de patients de l’A.M.P. nous avons peut-être un rôle à jouer pour cela ?
Si vous voulez aller voir le site ENDOCEL, c’est par ici
Et pour lire dans le détail, la décision de l’abm du 6 novembre 2013 sur l’ENDOCEL, c’est par ici
 
 

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