Innovation technique pour mieux évaluer la viabilité d’un embryon ?

MErck

Les couples infertiles vont mal, mais l’industrie pharmaceutique qui les « traite » va bien ! Nous déplorons l’augmentation de l’infertilité, mais les labos eux se « frottent » les mains car ils voient leurs chiffres d’affaires augmenter. Cela leur permet de faire de la recherche, de proposer des solutions plus efficaces, des médicaments mieux tolérés, de penser et produire des techniques innovantes pour améliorer les prises en charges médicales des couples infertiles. Mais est-ce que les couples infertiles Français bénéficient de ces innovations proposés par les laboratoires comme Merck-Serono ?

La semaine passée, ce dernier qui produit notamment  le GONAL-F,  (mise sur le marché Européen en 1995) a présenté différents dispositifs techniques censés améliorer les résultats des FIV.

« Gonal-f* réalise plus de 600 millions d’euros de chiffre d’affaires par an et représente
18% du chiffre d’affaires de la firme en France, a souligné Pierre-Henry Longeray,
président de Merck Serono France, lors de la conférence de presse. C’est le
deuxième produit le plus important du laboratoire sur le territoire, après
l’anticancéreux Erbitux* (cétuximab), a-t-il noté. »
Faut-il s’en réjouir ? Que faisons-nous pour réduire les causes de l’augmentation de l’infertilité ? Notamment la qualité de notre environnement qui en se dégradant entraine une hausse des situations d’infertilité.
« Outre Gonal-f*, il commercialise Luveris* (lutropine alfa),
Cetrotide* (acétate de cétrorélix), Ovitrelle* (choriogonadotropine alfa), Pergoveris*
(follitropine alfa et lutropine alfa) et Crinone* 80 mg/g (gel de progestérone).« 

« Le laboratoire souligne qu’il est le « seul au monde à proposer une offre complète de
médicaments destinés à traiter les troubles de la fertilité à chaque étape du cycle
reproductif ainsi que des versions recombinantes des trois hormones clés du
traitement de l’infertilité ». 
Un monopole qui donne le vertige, vous ne trouvez pas ?
Merck-Serono leader mondial des troubles de fertilité, communique sur son nouveau produit : EEVA nom d’un dispositif technique (premier produit de leur nouvelle activité « Fertility technologies ») qui doit permettre de mieux « prédire » et de façon plus précoce la viabilité des embryons.

Eeva

Eeva autorisée en France depuis le mois d’avril, c’est en fait une boite de pétri spécifique, un microscope dédié (placé à l’intérieur de l’incubateur) qui va prendre une image toutes les cinq minutes pendant trois jours et surtout un logiciel permettant d’analyser les images prises du développement embryonnaire et de « prédire » grâce à l’analyse croisée de différentes paramètres (biologiques, morphologiques, cinétiques, etc), les capacités de développement ultérieur de tel ou tel embryon, sa capacité à s’implanter. Ce test doit permettre de décider sur des éléments plus objectifs que « l’oeil » du biologiste, quels sont les embryons à transférer.
Il s’agit d’un « test non invasif complémentaire aux évaluations morphologiques
traditionnelles effectuées en laboratoire par des embryologistes », souligne la firme.
Il a été évalué dans une étude clinique prospective multicentrique, publiée dans
Fertility and Sterility en 2013.
En tout cas les déclarations de la société pourraient convaincre les plus récalcitrants des couples infertiles, avec l’augmentation impressionnante des taux de prédiction positive de la viabilité des embryons.
« Cette étude de cohorte a montré que le test Eeva*
permettait de prédire sur des embryons à J3 la formation des blastocystes (J5-J6)
avec une spécificité de 85%. Le taux de faux positifs est passé de 48% à 15% avec ce
test par rapport à la méthode traditionnelle de sélection des embryons basée sur la
morphologie, et la valeur prédictive positive est passée de 34% à 55%, indique le
laboratoire. »
Les quelques jours entre la ponction et le potentiel transfert, sont une étape très stressante pour nombre de couples infertiles : allons-nous avoir des embryons ? Vont-ils bien se développer ? Est-ce que nous allons pouvoir en transférer ? Vont-ils donner une grossesse ?  Car nous sommes encore bien trop nombreux à faire une, deux, voir trois, quatre (et plus) tentatives (FIV et TEC confondus) avant qu’ENFIN un embryon s’accroche (hors de toutes autres pathologies liées à la qualité des gamètes ou à la réceptivité utérine). Juste parce qu’il est difficile pour les équipes de « choisir » l’embryon J2 ou J5 qui aurait le plus de « chance » de s’implanter et de bien se développer. De nombreuses équipes de recherches publiques et privées s’activent pour mieux comprendre les mystères de l’embryon. Merck-Serono apporte un nouvel outil pour tenter de répondre à ces questions.
« Merck Serono va également lancer une étude européenne, incluant des centres
français, sur 1.500 patientes, baptisée TILE, afin de vérifier et confirmer l’intérêt de ce
test ».
Vous allez peut-être vous voir proposé d’intégrer cette étude, à suivre.
« Eeva* est déjà bien implanté en Espagne, où il a été lancé en septembre 2014, et
quelques centres britanniques en sont également équipés, a indiqué à l’APM Lucile Chantegrelet, directrice de la franchise fertilité de Merck Serono, lors de la conférence
de presse. Il commence à s’installer en Italie et en Allemagne, où il a été lancé en
début d’année. Aucun centre français n’est encore équipé, a-t-elle ajouté. »
Nous doutons et regrettons qu’ils puissent s’équiper un jour (sauf si le tarif n’est pas trop élevé). Peut-être que le fait de participer à l’étude TILE permet d’accéder à ce dispositif à moindre coût ? Est-ce que le matériel Eeva est prêté, loué aux équipes Françaises intégrant l’étude ? Est-ce que Merck-Serono installe ces équipes pour que ces derniers gères la technologie Eeva, sans que les équipes Françaises puissent s’en approcher ? Informations que nous aimerions connaitre pour mieux comprendre à quelles sauce nos embryons seront « analysés ».

De plus, Merck-Serono envisage dans un avenir proche, de « lancer, trois nouvelles innovations techniques« . 
GERI  semble le produit le plus prometteur, car il va combiner un incubateur avec système « TIME LAPS », comme il en existe déjà via l’embryoscope (produit par une firme concurrente dont nous vous avions déjà parlé dans un précédent article) avec son système de test prédictif Eeva. L’innovation résidera dans la possibilité d’accueillir dans cet incubateur six boites de pétri, de six couples différents avec six microscopes, un pour chacune des boites de pétri ; limitant ainsi les interactions néfastes (ouvertures des portes, manipulations à l’extérieur, perte de la température constante). Pour rappel dans une boite de pétri, vous avez plusieurs embryons d’un même couple.
Les équipes d’amp françaises ont déjà bien du mal à investir dans des incubateurs avec système TIME LAPS (voir cet article), ce que nous regrettons. En effet très peu d’équipes (trois ou quatre en 2014) en France possèdent ce système, pourtant utilisé dans d’autres pays avec succès. Ce n’est pas demain la veille qu’elles vont pouvoir investir dans cette nouvelle technologie Eeva, qui doit bien couter un petit peu plus cher (à moins que…mais nous n’avons pas d’information sur le prix du système Eeva). Pourtant, nous aimerions vraiment que les taux de réussite des FIV réalisées en France augmentent. Permettant ainsi aux couples de passer moins de temps dans les parcours d’AMP, de moins s’épuiser face à l’accumulation des échecs, de faire faire des économies à la sécurité sociale.
 Les autres nouveautés du laboratoire Merck-Serono sont :
« Gems* est un nouveau milieu de culture dont le marquage CE est attendu pour
l’automne, a-t-elle noté.
Gavi* est « le premier instrument de vitrification au monde à être automatisé », note la
firme. Il permet une standardisation et une homogénéisation de la vitrification
embryonnaire, avec échanges de fluides et scellement automatiques, a précisé la
responsable.
La firme lancera par ailleurs son gel de progestérone Crinone* en septembre en
France. Le produit est disponible depuis de nombreuses années dans d’autres pays,
mais pas encore dans l’Hexagone pour des « histoires d’AMM [autorisation de mise sur
le marché] et de procédures réglementaires », a-t-elle déclaré à l’APM. Il ne sera pas
remboursé, a-t-elle précisé. »
 
N.B. : Le manifeste de l’association COLLECTIF BAMP, réclame une augmentation des moyens mis à dispositions des équipes AMP Françaises pour qu’elles puissent offrir à leurs patients des technologies plus performantes.
 
Sources : Redaction APMNEWS.COM 25 juin 2015

Commentaire à propos de cet article :

  1. Je trouve ça super que les labos privés innovent et investissent dans des recherches prometteuses.
    Mais il ne faut pas oublié qu’un stylo de gonal coûte dans les 300€ alors que la même molécule sans le stylo d’injection coûte dans les 15€, idem pour l’ovitrelle, la différence de prix est vertigineuse…
    Si Merck peut autant investir et pas les centres de PMA, c’est grâce à nos cotisations de sécu qui vont dans leurs poches…
    Après, je suis la première à préférer un stylo d’injection à des seringues avec des produis à mélanger, c’est beaucoup moins stressant, on n’a moins peur de se tromper, mais la différence de prix est peut-être à discuter 😉

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