Pour une loi de bioéthique moderne et de qualité pour toutes et tous

La loi de bioéthique cadre l’activité d’AMP en France. Depuis 2017 nous travaillons sur ce sujet (questionnaire bioéthique à nos adhérents, participation aux Etats Généraux de la biéothique, contribution au CCNE, rendez-vous avec des parlementaires, rdv au ministère de la santé, etc). Voté en première lecture à l’Assemblée Nationale fin 2019, puis au Sénat en février 2020. Elle devait revenir à l’Assemblée Nationale fin avril pour le vote définitif. Mais la crise du covid-19 est passée par là. Si vous êtes intéressé par toutes ces étapes vous pouvez les retrouver dans nos précédents articles.

Aujourd’hui, la situation est simple : la loi telle qu’elle risque d’être votée ne nous convient pas, tant sur certains aspects dits « sociétaux » et surtout sur les aspects « médicaux » relatifs à l’AMP. Nous le répétons à longueur d’interventions sur ce sujet (médias, rdv politiques. Voir nos différents articles et ci dessous).

Aujourd’hui c’est la dernière opportunité de faire entendre, tous ensemble nos voix sur ce sujet, auprès des parlementaires qui vont rediscuter cette loi. En effet, elle doit être de nouveau discuté en hémicycle du 6 au 10 juillet. Il est possible de déposer des amendements jusqu’au 25 juin. Puis ils seront étudiés en commission spéciale bioéthique les 30, 31, 01 et 02 juin.

Nous avons une nouvelle fois, mis en route des actions :

  • nous avons renvoyé le courrier ci-dessous (déjà fait fin février suite au vote Sénat et à l’arrivé du nouveau ministre des solidarités et de la santé) à tous les parlementaires (députés et sénateurs) ainsi qu’aux ministres (santé et justice pour les aspects filiation des enfants nés via un don de gamètes).
  • nous avons relancé notre campagne citoyenne FACTIO qui vous permet d’alerter vos parlementaires directement.
  • nous avons déjà obtenu 4 rendez-vous avec des députés la semaine prochaine.

Vous pouvez, vous aussi être acteurs de cette dernière ligne droit au sujet de la bioéthique :

  • vous pouvez soutenir notre campagne citoyenne FACTIO, alerter vos parlementaires et partagez là le plus possible. MERCI vous êtes déjà nombreux à l’avoir fait cette semaine. Il faut continuer.
  • vous pouvez envoyer un mail à votre député ou votre sénateur, comme certains l’avait fait à l’automne dernier pour leur demander des RDV. Si le temps est court, le simple envoie du courrier ci-dessous (que vous trouverez en PDF aussi à la fin) permet de les sensibiliser, voir de les mobiliser, pour qu’ils puissent dans l’hémicycle soutenir nos demandes.
  • vous pouvez nous soutenir avec vos messages d’encouragements, cela nous aide beaucoup.

ENSEMBLES essayons d’obtenir une loi de bioéthique à la hauteur des enjeux.

Pour une AMP moderne et de qualité pour toutes et tous !

Comme vous, acteurs parlementaires, l’association COLLECTIF BAMP a à cœur d’avoir une loi et des pratiques de bioéthique en accord avec le besoin de modernisation de l’activité d’AMP tant d’un point de vue sociétal : OUI à la PMA pour toutes !, que d’un point de vue médical : améliorons l’AMP Française ! La révision des lois de bioéthique intervenant au mieux tous les 5 ans (le dernier intervalle a même été de 8 ans), il est essentiel que le prochain vote permette d’atteindre cette double ambition sans attendre des années. Il est aussi nécessaire de ne pas entériner un texte qui ne soit, dans ses aspects médicaux, obsolète avant même d’avoir été voté.

Malheureusement, il se peut que cela soit le cas sans votre intervention. En effet, après un premier round (lecture-discussions-votes) réalisé par les députés et les sénateurs, le texte n’a pas été voté comme initialement prévu fin avril, pour cause de crise du COVID-19. Cette crise, avec l’arrêt brutal de toute activité d’AMP en France et en Europe, a montré encore plus crûment les problématiques sur lesquelles nous alertons depuis des années. Après deux mois et demi d’arrêt total, l’activité reprend doucement, en mode dégradé, pas pour toutes les techniques, ni pour tous les patients en attente. Les délais de prise en charge vont s’allonger, l’égalité de l’accès aux soins va se creuser. L’activité d’AMP va être impactée sur plusieurs mois.

Certains points du projet de loi de bioéthique, s’ils ne sont pas modifiés, vont eux aussi contribuer à embourber l’activité d’AMP qui s’apprête à accueillir un volume de patients plus important (femmes seules, couple de femmes).   La France n’offre pas à ses concitoyens les outils de diagnostic et l’organisation du soin pour une AMP Française moderne qui puisse vraiment répondre aux besoins de TOUS les patients, dans des délais raisonnables et sur tout le territoire.

Nous aimerions vraiment que les parlementaires et le nouveau Ministre des Solidarités et de la Santé considèrent de revoir certains points de la loi sous l’angle « du monde d’après le covid-19 ».

Pour réduire les délais, il faut améliorer les prises en charge en autorisant des outils comme le DPI-A pour éviter que les patients ne perdent du temps dans des protocoles couteux et épuisants qui durent des années. Il faut autoriser aux centres privés d’AMP de pratiquer des techniques, jusque-là réservées aux centres publics, comme les dons de gamètes, la préservation de la fertilité, afin que l’activité soit mieux répartie territorialement et que les délais d’attente soient raccourcis.

Enfin, il faut aussi que la Ministre de la justice entende les attentes des parents d’enfants nés via un don de gamètes : nous refusons la stigmatisation de nos enfants et de nos familles. L’information des enfants au sujet de leur mode de conception est de la responsabilité de leurs parents.

L’AMP Française doit accueillir toutes les femmes, mais elle ne pourra le faire dans de bonnes conditions que si vous acceptez de l’améliorer concrètement.

1- Ce que nous vous demandons de revoir :

Le Diagnostic Pré-Implantatoire des embryons Aneuploïdes (DPIA) (voté en commission Sénat, mais refusé en plénière et refusé par les députés et par la précédente Ministre de la santé).

Rappelons que les embryons aneuploïdes sont des embryons n’ayant pas le bon nombre de chromosomes. 70 % à 85 % des embryons obtenus en FIV sont concernés et ne s’implantent pas !  Il n’y aura pas de nouvelle discussion à l’Assemblée sur cette question. C’est très dommageable pour les couples, dont les femmes se voient réimplanter des embryons majoritairement non-viables. Pour rappel, en France, 4 FIV sur 5 se soldent par un échec (rapport de la Cour des Comptes, octobre 2019). Les accusations d’eugénisme relèvent du fantasme ou de l’instrumentalisation. La question éthique est réglée depuis des décennies en France puisque le DPN (diagnostic pré-natal), le DPI (diagnostic pré-implantatoire) pour risque de transmission de maladie grave et incurable, l’IVG, l’IMG (Interruption médicale de Grossesse) sont autorisés et encadrés. Ce qui nous importe à nous, comme à la Cour des Comptes, c’est l’efficacité d’une technique : traitements hormonaux pour rien, transferts d’embryons pour rien, fausse-couches… Le DPN (diagnostic pré-natal) est autorisé et proposé depuis des années, notamment pour le dépistage de la Trisomie 21. Informées, les femmes sont libres de poursuivre ou d’interrompre leur grossesse. Pourquoi cette pratique d’autonomie du patient est autorisée une fois la grossesse engagée, mais interdite avant ? Nous ne demandons pas la validation d’une nouvelle technique, mais de déplacer le dépistage en amont de la grossesse, avant le transfert pour les femmes en FIV. Le DPIA est un acte moins traumatisant qu’une IMG ou qu’une fausse couche.

Le CCNE y a donné un avis (n°129) favorable. Le Conseil d’Etat (28 juin 2018) y est également favorable au nom du principe éthique de « non-malfaisance »

Le refus du gouvernement d’autoriser le screening des embryons en FIV dans les indications qui sont reconnues mondialement comme pertinentes (pour les femmes de plus de 35 ans, et/ou présentant de nombreuses fausses couches ou échecs d’implantation) est incompréhensible humainement, éthiquement, et d’un point de vue économique. La Sécurité Sociale rembourse des tentatives dont tous les professionnels conviennent qu’elles n’aboutiront pas. Le vrai scandale est là, et pas dans un prétendu « eugénisme ». Les chiffres des résultats des FIV en France sont très parlants :

  • 4 FIV sur 5 se soldent par un échec,
  • 151 611 tentatives d’AMP dont 102 097 FIV permettent d’obtenir 19 728 naissances, (chiffres de l’Agence de la Biomédecine, année 2017)
  • 70 à 85 % des embryons obtenus en FIV ne s’implantent pas,
  • 246 263 embryons surnuméraires conservés au 31/12/2017 dont un certain nombre pour rien puisque aneuploïdes,
  • des embryons hors standard morphologique sont détruits alors que les études montrent que ceux dont le comptage chromosomiques réalisé est bon, donnent des taux de grossesse de plus de 50 %
  • les transferts d’embryons multiples représentent encore 50% des transferts. Ce qui maintient un niveau important de grossesses gémellaires, alors que les recommandations nationales soutiennent le transfert d’un seul embryon.

Refuser le DPI-A c’est maintenir l’AMP et la recherche française dans une qualité moyenne voire médiocre. Les plus fortunés de nos concitoyens continueront de partir à l’étranger pour bénéficier d’une prise en charge de plus haute qualité. 

Refus de l’AMP post-mortem :

C’est regrettable. Une femme qui perd son conjoint au cours d’un parcours d’AMP ne pourra pas se voir réimplanter les embryons déjà conçus, avec son conjoint. Cette mesure porte toute l’incohérence de ce projet de loi de bioéthique.

Le sujet qui mêle mort, sexualité, AMP, droit des femmes, corps des femmes, autonomie des femmes, filiation, semble avoir été impossible à penser pour nos politiques. Leur refus débouche sur une incohérence et une aberration. La veuve pourra donner ses embryons à un autre couple, puis demander ensuite à bénéficier d’une AMP avec don de sperme en tant que femme seule.

L’Agence de la Biomédecine avait pourtant pointé ces incohérences.

Le CCNE s’est déjà prononcé, via quatre avis favorables pour l’AMP post-mortem, au cours des successives révisions des lois de bioéthique.

2 – Ce que nous vous demandons de confirmer :

Le critère pathologique retiré par les députés puis réintroduit par les sénateurs. L’infertilité existe, il ne faut pas l’invisibiliser. Des pathologies affectent la fertilité des femmes et des hommes.

Le critère pathologique peut cohabiter avec le recours sociétal à l’AMP. L’un n’exclut pas l’autre. L’infertilité se moque bien de l’orientation sexuelle qui ne doit pas être un motif de discrimination.

Les sénateurs ont réintroduit ce critère pathologique pour justifier l’exclusion des lesbiennes et femmes seules, du remboursement par la Sécurité Sociale des soins d’AMP : c’est indigne et contraire aux textes internationaux sur la santé reproductive et la lutte contre les discriminations signées par la France.

Nous demandons le maintien du critère d’infertilité pathologique et celui sur le risque de transmission d’une maladie grave et incurable. Nous demandons l’ouverture de l’AMP aux couples de lesbiennes et femmes seules avec le maintien du remboursement des soins d’AMP pour toutes.

Nous demandons également la mise en route du Plan Fertilité annoncé lors du vote en première lecture, à l’Assemblée Nationale. L’infertilité est une question de santé publique, urgente.

L’accès à l’AMP compromis :

Avec la fin de l’autorisation (amendement Ménard dans l’article 2 du projet de loi) du recueil, du prélèvement et de la conservation des gamètes et des embryons pour les centres d’AMP privés, c’est l’organisation globale de l’AMP qui va subir d’importants dommages. Les centres privés réalisent aujourd’hui plus d’1 FIV sur 2 ! S’ils ne peuvent plus prélever (les ovocytes), recueillir (les spermatozoïdes), conserver les embryons, ils ne seront plus en mesure d’effectuer leur activité quotidienne de FIV. Dans certaines régions, il n’y a pas d’offre d’AMP publique, seul le secteur privé propose une prise en charge. C’est le cas pour 14 départements sur 52 en ce qui concerne la FIV (chiffres rapport 2019 de la Cour des comptes).

Conséquence : l’accès à l’AMP devient impossible dans certains territoires et très longue dans d’autres, alors que la loi est censée l’ouvrir à de nouveaux publics.

Pourquoi la loi de bioéthique revient sur 25 ans d’activité de l’AMP libérale en France ? Pourquoi cette diabolisation du secteur libéral de l’AMP ?

Refus du double don et de la ROPA :

Ouvrir l’AMP à toutes les femmes doit déboucher sur l’autorisation du double-don de gamètes et sur la méthode ROPA (dans un couple de femme, l’une donne ses ovocytes à celle qui porte l’enfant).

De nombreux embryons « surnuméraires » sont en attente dans des cuves réfrigérées. Le don d’embryon est une pratique gratuite en France qui bénéficie aux couples hétérosexuels dont les deux membres du couple ont une stérilité. Pourtant, les couples se tournent plus facilement vers le double-don, à l’étranger. Pourquoi ? Adopter le projet parental d’un autre couple est plus difficile psychologiquement que de faire appel à un double don de gamète.

Dominique MEHL et Martine GROSS ont souligné dans une étude « Infertilité : double don de gamètes ou don d’embryon ? » réalisée en 2017 et publiée en 2018, que les « femmes qui ont le choix optent en majorité pour le double-don » (Cairn page 106),

Dans son rapport de 2018 l’Agence de la biomédecine (ABM) indique : « La révision de la loi pourrait être l’occasion de s’interroger sur l’interdiction du double-don de gamètes ».

Nous demandons l’autorisation du double-don de gamètes et de la méthode ROPA.

Retrait (par les sénateurs) de l’autoconservation des ovocytes :

L’autoconservation des ovocytes doit être autorisée, au titre de la prévention de la fertilité féminine. Les hommes peuvent préserver leur fertilité depuis des décennies sans que cela ne choque personne. Dans un souci d’égalité, le même droit doit être accordé aux femmes.

L’avis 129 du CCNE y est favorable.

Le Conseil d’Etat souligne que « l’autoconservation ovocytaire est de nature à améliorer considérablement la réussite de l’AMP et d’éviter la multiplication de tentatives infructueuses, éprouvantes pour le couple et coûteuses pour l’assurance maladie ».

Nous demandons l’autorisation de l’autoconservation des ovocytes, tant pour les centres privés que publics, dans le cadre d’une politique de santé publique et de prévention de la santé reproductive, de la fertilité.

Filiation des enfants nés via un don de gamète :

Le droit actuel doit s’appliquer à tous les parents sans distinction liée à l’orientation sexuelle ou à la santé reproductive. L’article 311-20 du Code civil qui pose une filiation inattaquable pour les deux membres d’un couple hétérosexuel ayant recours au don de gamètes, depuis 1994, doit s’appliquer également aux lesbiennes.

Nous refusons toute stigmatisation des enfants nés via des dons de gamètes, toute stigmatisation de nos familles.

Nous refusons la Reconnaissance Conjointe Anticipée (RCA) pour les couples de lesbiennes, comme pour les couples hétérosexuels.

Nous refusons toute mention du recours au don de gamète sur les actes de naissance et demandons que les lesbiennes bénéficient des mêmes droits que les hétérosexuels concernant la filiation des enfants nés via un don.

Nous sommes les nouvelles générations de parents d’enfants nés via un don de gamètes. Nos enfants sont informés de leur mode de conception. Ils grandissent dans un environnement qui ne prône plus, et depuis longtemps, le secret comme solution.

Notre association soutient la création de la commission auprès de l’Agence de la Biomédecine, qui permettra à toute personne de savoir si elle est née ou pas d’un don de gamètes et d’obtenir des informations identifiantes ou non identifiantes sur le ou la donneuse.

Avant le retour du texte à l’Assemblée nationale, et sachant qu’il ne peut pas être adopté en l’état sans engendrer des situations inacceptables, nous requérons toute votre attention afin que le droit de toutes les familles soit respecté. Nous espérons surtout que le nouveau Ministre des Solidarités et de la santé sera être à l’écoute des patients et des professionnels de l’assistance médicale à la procréation.

Ce texte au format PDF, si vous voulez l’envoyer à votre député-e ou/et votre sénateur-trice. MERCI 

Courrier 19 juin loi bioéthique juillet 2020

 

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